Bangkok : une ville qui m’a dépassé
Bangkok faisait partie de ces villes que j’imaginais depuis longtemps. Une capitale vibrante, intense, pleine de contrastes. J’y suis arrivé avec curiosité, presque avec excitation, en me disant que cette mégalopole allait me bousculer, peut-être même me fasciner. Mais très vite, le ressenti a été tout autre.
Dès les premiers instants, Bangkok m’a semblé étouffante. Trop de monde, partout, tout le temps. Des foules compactes, des trottoirs encombrés, des rues saturées de scooters, de voitures et de tuk-tuk qui klaxonnent sans cesse. Le chaos règne sur les routes, et même en tant que simple piéton, on se sent constamment sur le qui-vive. Traverser une rue devient parfois une épreuve, respirer aussi. La pollution est omniprésente, lourde, presque palpable.
Très rapidement, mon corps a commencé à réagir. J’ai fait plusieurs crises d’angoisse, avec cette sensation oppressante de ne plus avoir d’air, accompagnée de maux de ventre persistants. Pour la première fois depuis le début du voyage, je ne me sentais pas simplement fatigué ou déboussolé, mais réellement mal à l’aise. Une sensation diffuse de peur, d’insécurité, comme si quelque chose n’allait pas, sans que je puisse vraiment l’expliquer.
Les auberges n’ont rien arrangé. Elles n’étaient pas du tout comme je les imaginais. Certaines étaient franchement sales, mal entretenues, situées dans des rues sombres, très sales elles aussi, parfois même mal famées. Le soir, rentrer à pied me mettait mal à l’aise. Je regardais autour de moi, sur mes gardes, avec ce sentiment de danger que je n’avais encore jamais ressenti depuis mon départ. C’était la première fois du voyage que je ne me sentais pas en sécurité.
Nous sommes restés trois à quatre jours à Bangkok, le temps de visiter un ou deux temples, de faire quelques achats et de tenter malgré tout de comprendre la ville. Les temples, évidemment, sont magnifiques. Riches, dorés, imposants. Mais là encore, le contraste m’a profondément marqué. À chaque coin de rue, on passe de buildings modernes, immenses, presque futuristes, à des buis-buis délabrés, insalubres, parfois presque nauséabonds. Une pauvreté très visible, très crue, au pied de temples recouverts d’or et de décorations étincelantes. Ce décalage permanent m’a mis profondément mal à l’aise.
Nous avons aussi passé du temps au CentralWorld, immense centre commercial ultra-moderne, parfait pour acheter ce dont nous avions besoin pour la suite du voyage. Climatisation, confort, efficacité. C’était presque irréel. Comme si Bangkok oscillait sans cesse entre deux mondes qui se croisent sans jamais vraiment se rencontrer. Quelques marchés, aussi, plus locaux, plus vivants, mais toujours envahis par la foule, la chaleur et le bruit.
Avec le recul, je pense simplement que Bangkok n’était pas faite pour moi. Ou peut-être pas à ce moment-là. J’avais besoin de nature, de calme, de lenteur, de respirer. Bangkok, elle, ne ralentit jamais. Elle impose son rythme, son chaos, son intensité permanente. Certains adorent cette énergie brute, cette impression que tout peut arriver à chaque instant. Moi, je m’y suis senti dépassé, vidé, parfois même vulnérable.
Je ne dirai pas que Bangkok est une mauvaise ville. Elle est impressionnante, immense, puissante. Mais pour moi, elle a surtout été une étape difficile, une parenthèse inconfortable dans ce voyage. Et quand nous avons quitté la ville, je l’avoue sans détour : j’ai ressenti un immense soulagement. Comme si mon corps et mon esprit pouvaient enfin relâcher la pression.